mercredi 21 octobre 2009

Chablis à l'aveugle

Le cours de mardi était le premier de deux cours sur la Bourgogne. En première partie théorique le chablisien, puis la côte de Nuits. J'y reviendrai plus en détail dans mes prochains posts.

Ce qui m'a surtout allumée cette semaine, c'était la dégustation à l'aveugle de trois vins.

Pour se faire la bouche, en pré-dégustation, avant l'exercice à l'aveugle, on avait un Bourgogne Les Clous de la côte chalonnaise, du domaine de Villaine. Rien de bien mémorable, sinon qu'il nous préparait à ce qui allait suivre...

À l'aveugle, le seul paramètre que nous avions, c'est qu'il s'agissait de trois Chablis, par conséquent, 100 % chardonnay.

J'ai donc devant moi trois verres de Chablis qui sur le plan visuel ont tous la même couleur. Bon, je peux bien me dire que les trois sont jaune paille clair aux reflets verts, j'essaie quand même de nuancer.

Le premier est fluide à dense, le deuxième, plus fluide, et le troisième fluide à dense, avec un éclat un petit plus brillant que ses deux prédécesseurs. Passons à l'analyse olfactive. Au nez, j'aime d'emblée le premier Chablis. J'y détecte une belle minéralité, un petit côté pierre à fusil, fruits frais (pomme verte), quelque chose de pur et de fin, avec une certaine profondeur. Bref, je suis déjà intéressée à ce qui va suivre sur le plan gustatif. Bon, je suis pas déçue puisque en bouche j'ai pas du tout envie de crâcher ce vin ce soir. Finesse et élégance, acidité vive, de la chair en bouche. Je reste sur des notes minérales, un peu herbacées, longueur moyenne. Je sais que j'ai affaire à un bon vin, mais je dois passer aux deux autres.

Côté visuel, le deuxième Chablis est identique au premier, avec une coche en moins de densité si je me fie aux larmes. Sur le plan olfactif, je sens des notes plus épicées et fumées que le premier, mais l'intensité au nez est plus faible. Sans même l'avoir goûté, ce deuxième vin fait me fait déjà regretter le premier. Au gustatif, je ne déroge pas de mes premières impressions. Ce numéro deux n'a pas la persistance arômatique au nez et en bouche du numéro un.

Jusque-là, pas trop mêlée dans mes impressions.

Arrive le troisième Chablis, légèrement plus brillant à l'oeil que les deux premiers. Sa densité que je mesure aux larmes est semblable au premier. Au nez, plus épicé que minéral, et son fruit me fait penser à des noix. Y a quelque chose de plus persistant au nez que le premier. Je commence à douter du numéro un. Je continue. Au gustatif, c'est charnu en bouche, mais je n'arrive pas à oublier mon numéro un. Qui dit noix, dit une note d'amertume. Pas sûre qu'il va déloger mon premier coup de coeur. Mais bon, que penser. Sa brillance et sa persistance arômatique me déstabilisent. Je reviens constamment me valider avec mon premier et mon deuxième Chablis. L'acidité me semble un peu plus nerveuse que celle du premier.

La dégustation individuelle se termine. Véronique entame la plénière. Quel vin avez-vous préféré? Vote à main levée. Premier Chablis, je lève la main avec à peine deux ou trois autres autres de mes comparses. Deuxième Chablis, aucun preneur. Troisième Chablis, tout le monde ou presque lève la main.

Quant à se prononcer s'il s'agissait dans chaque cas, d'un Petit Chablis, d'un Chablis, d'un Chablis Premier Cru ou d'un Chablis Grand Cru, les avis sont plutôt partagés. La seule chose dont je suis certaine, c'est que les vins 1 et 3 sont de qualité comparable et qu'ils sont supérieurs au vin 2.

Pas évident ce genre d'exercice, mais oh combien révélateur. Il se trouve que les trois Chablis en question sont tous en provenance de la maison William Fèvre et issus du millésime 2007, mais les premier et troisième sont des Premiers Crus. Le premier, le Fourchaume, est issu de la rive droite du Serein, et le troisième, les Vaillons, de la rive gauche.

Voici ce qu'en dit Benoit France, dans le Grand Atlas :

"Qu'ils soient issus de la rive gauche ou de la rive droite, la minéralité des Chablis Premiers Crus est importante et parfois proche de celles des Grands Crus. S'ils ont fait l'objet de rendement raisonnable, leur complexité, leur texture et leur typicité sont clairement affirmées. Il est difficle de dire que les Premiers Crus de la rive droite, qui passent pour les plus fins, sont supérieurs à ceux de la rive gauche. Chacun d'entre eux possède une personnalité précise qu'il est possible de décrire, tout au moins pour ceux fréquemment commercialisés avec la mention de leur nom."

D'autres extraits du Grand Atlas :

"Rive droite
FOURCHAUME. Dans le prolongement des Grands Crus, le vignoble est allongé en des expositions variées. Cela explique la raison pour laquelle Fourchaume offre une gamme d'expressions multiples. Ce sont le plus souvent des vins amples et harmonieux, où la note minérale est peu présente.
(...)
Rive gauche
VAILLONS produit un vin fin, élégant et subtil, qui s'exprime rapidement."

Qu'est-ce qui explique l'engouement de la classe pour Les Vaillons? Peut-être est-il plus flatteur au nez et au palais? L'ordre de dégustation y est aussi sans doute pour quelque chose. S'il était tout aussi intéressant dans son style que le Chablis Premier Cru servi en premier, il avait l'avantage d'être servi en dernier, donc il pouvait compter sur une certaine confusion des sens.

La dégustation à l'aveugle demeure celui qui pour moi est le plus instructif. Il met en éveil tous mes sens et il m'aide à me libérer de toute forme de jugement à priori. J'aime cette sensation de liberté. Cette dégustation m'a également permis de me rendre compte à quel point j'ai développé une meilleure acuité sur les blancs au cours de la dernière année.

Voici le détail des vins en question.

Number one : Chablis Premier Cru Fourchaume, 2007, William Fèvre, 44,75 $, 13 %

Number two : Chablis Les Champs royaux, 2007, William Fèvre, 24,45 $, 12 %

Number three : Chablis Premier Cru Les Vaillons, 2007, William Fèvre, 34,77 $, 13 %

Mes choix étant dans l'ordre qualitatif 1-3-2, mon ego s'en tire pas trop mal pour une dégustation à l'aveugle!

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