samedi 6 février 2010

Analyse sensorielle... la théorie

J'ai négligé mon blog en janvier mais me voilà de retour en ce beau week-end de février. J'ai plusieurs comptes rendus à vous faire et je commence avec des CR sur mes cours d'analyse sensorielle.

Mise en garde : le compte rendu qui suit ne se veut aucunement divertissant. Il s'agit d'un exposé très sommaire et reflétant assez fidèlement mes notes de cours avec quelques éléments glanés ici et là sur le Web.

Des cinq sens que nous possédons, quatre d'entre eux sont impliqués dans la dégustation. Vous aurez deviné qu'il s'agit de la vue, de l'odorat, du goût et du toucher. Quoique pour les vins effervescents ou la bière, on pourrait toutjours se servir de l'ouïe pour "écouter" les bulles et la mousse.

La vue qui compte pour la moitié de l'activité du cerveau nous renseigne sur la couleur et l'apparence générale du produit analysé. L'appréciation qu'on fait de la couleur d'un vin (teinte, luminance, saturation) dépend de son épaisseur et de sa turbidité. Quand on apprécie l'apparence, on s'attarde aux jambes aussi appelées larmes du vin. Ces coulisses qu'on voit se former sur les parois du verre ne sont pas un indicateur de la teneur en glycérol du vin ni de son gras mais bien de sa teneur en alcool. Ainsi, un vin aux larmes denses est un vin à forte teneur en alcool.

L'odorat est toujours en alerte et il compte pour 95 % de l'expérience dégustative. La masse d'information que nous emmagasinons sur un vin entre dans le cerveau par la voie nasale et rétro-nasale. Le nez détecte un grand nombre de composés volatils d'un poids moléculaire compris entre 300 et 500 qui sont des signaux odorants. L'organe de détection des odeurs se loge au sommet des fosses nasales et celui-ci est balayé lors des inspirations. La détection des molécules se fait par les voies olfactive ou rétro-olfactive. L'essentiel de ce qu'on appelle le goût est en fait l'odeur.

Notre organe de détection consiste en une muqueuse (2,5 cm carrés) recouverte de mucus, qui comprend environ 50 millions de cellules ciliées, ce qui permet d'augmenter la surface de contact à 500 cm carrés. Le mucus est constitué de polysaccharides et de glycoprotéines qui retiennent de l'eau. La détection des odeurs a donc lieu dans l'eau.

Les neurodétecteurs olfactifs sont parmi les rares neurones qui se regénèrent en permanence. C'est pourquoi nous jouissons d'un nez éternellement jeune et que nous ne perdons jamais l'odorat. À la surface des cils se trouvent des récepteurs de faible spécificité et affinité qui reconnaissent la forme de molécule dans l'espace et non sa formule brute (une molécule peut se lier à plusieurs récepteurs et inversement). L'ensemble des récepteurs (un millier) dont dispose un individu lui est spécifique, d'où l'aspect subjectif du goût. Ainsi, il n'y a pas de meilleurs dégustateurs, mais des individus plus forts sur une série de molécules.

Le goût est le sens grâce auquel on perçoit les saveurs propres aux aliments (sapidité). C'est par le goût qu'on discerne ce qui est bon. Il s'agit d'un sens intuitif et qui varie selon nos penchants particuliers. Une partie du goût est innée, et l'autre, acquise. Le goût s'éduque et il est modulé par notre entourage (pays, coutume, famille, société, amis, école, publicité...).

Le sens du goût, localisé sur la langue, fait référence à la somme des sensations perçues lors de la mise en bouche d'un aliment ou d'un liquide. Ainsi, la langue est tapissée de papilles gustatives qui contiennent les bourgeons du goût dans lesquels sont situés les récepteurs chimio-sensitifs.

Il existe deux types de stimulus gustatif : les stimuli ioniques (acide et salé) et les stimuli moléculaires (sucré et amer). Les molécules sapides sont innombrables, alors outre le classement classique des sensations gustatives qu'en Occident nous répertorions en quatre catégories, soit le sucré, le salé, l'acide et l'amer, rappelons-nous que nos récepteurs détectent bien plus que 4 types de molécules.

La localisation sur la langue des quatre goûts était traditionnnellement la suivante (mais ce modèle est un peu dépassé de nos jours) : le sucré se détecte surtout sur le bout de la langue, le salé sur les côtés avant, l'acide sur les côtés arrière et l'amer au fond de la langue.

Composés représentatifs des quatre principales sensations gustatives :
Sucré : saccharine, aspartame, fructose, glucose, sucrose
Acide : acide acétique, acide citrique, acide chlorhydrique
Salé : chlorure de sodium, chlorure de potassium, chlorure de calcium
Amer : caféine, quinine, sulfate de magnésium, nicotine, morphine, strychnine

Composés propres à d'autres sensations gustatives :
Umami : monosodium glutamate, L-arginine, L-glutamine
Métallique : sulfate ferreux
Alcalin : bicarbonate de soude

En quoi consiste la perception du goût ? Le plus souvent, nous associons au goût une perception olfactive: en fait lorsque nous goûtons, 80% de la perception est composée d’une odeur (par voie rétro-nasale).

La bouche contient également des récepteurs thermiques, mécaniques et des récepteurs de douleur; aussi la température et la texture des aliments influencent la perception de leur goût. C'est là qu'intervient le sens du toucher. Parmi les sensations tactiles que nous décelons en bouche, il y a l'astringence, le gras, le pétillant et la chaleur.

À titre d'exemple, le piment donne une sensation de chaleur, et la menthe, de fraîcheur. L'astringence est une réaction des muqueuses à certains composés, dont les tanins.

La salive joue un rôle important dans la dégustation. En dissolvant les substances sapides, elle permet la perception des saveurs. Au contact du sucre, notre salive devient plus onctueuse et épaisse, au contact de l'acide, elle devient fluide et abondante. Le débit salivaire affecte la perception : trop de salive dans la bouche peut diluer les saveurs alors qu'une bouche sèche est moins réceptive aux perceptions.

Outre la salive, nos seuils de perception des saveurs sont influencés par bien d'autres variables. Nous y reviendrons dans un autre CR sur l'analyse sensorielle.

Saviez-vous que certaines personnes souffrent de troubles liés au goût (agueusie : absence de sensibilité gustative) ou à l'odorat (anosmie : perte progressive de l'odorat)? Wikipédia vous renseignera mieux que moi à ce sujet. Toujours est-il que quand le prof a fait allusion à l'agueusie, certains d'entre nous étaient sans équivoque : mieux vaut perdre la vue ou l'ouïe que de perdre le goût ou l'odorat.

En résumé, le goût du vin n'est pas une propriété exclusive du vin, mais une construction mentale (représentation) résultant de l'interaction d'un vin avec un sujet dans des conditions particulìères. Pour faire plus simple, disons que le goût du vin n'est pas dans le verre mais dans la tête. Vous l'avez déjà expérimenté, j'en suis sûre. Le goût d'un même vin change en fonction des individus qui le dégustent et des lieux ou moments où il est dégusté.

Le prochain CR portera justement sur les aléas de la dégustation.

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